samedi 10 septembre 2011

Et Pauc assassina Sylva ?

Je viens de revoir la dernière partie du film Lumumba de Raoul Peck, les scènes d'assassinat du premier Premier ministre de la République démocratique du Congo et de ses compagnons. J'ai revu ces scènes comme si j'y recherchais quelque chose de particulier. Et j'ai fini par trouver. Bien que ce soit une fiction, cette scène peut ressembler à bien des égards à celle de l'assassinat du premier Président de la République Togolaise, Sylvanus Olympio, affectueusement appelé Sylva ou Fo-Sylva.

En effet, le 13 janvier 1963, avant que je ne fusse né, Sylva, Président de la jeune République du Togo, a été trucidé dans une ruelle de Lomé, non loin de sa résidence. Ce qu'on sait avec certitude. Un groupe de soldats démobilisés s'était rendu à son domicile pour le déposer. Il se réfugia dans l'enceinte de l'Ambassade des Etats-Unis. Au petit matin, il sortit de cette enclave diplomatique et fut abattu. Ce qu'on ne sait pas : qui l'a tué ? Et viennent toutes les autres questions.

Bien des années auparavant, nous apprîmes que l'assassin n'était nul autre Eyadéma Gnassingbé. Celui-ci avait revendiqué son acte avec force détails au fil des ans. Dans mon quartier de Bè Alaglo, je me suis même laissé dire que Sylva aurait pu être ressuscité par feu Mgr Gbikpi-Bénissan si Eyadéma ne lui avait pas coupé les tendons d'Achille. Et aujourd'hui à la faveur des audiences publiques de la Commission Vérité Justice et Réconciliation mise en place par pour "faire la lumière sur les crimes politiques commis au Togo de 1958 à 2005", une autre version de cet assassinat nous est servie.

Non Eyadéma n'a pas tué Sylva. Pas même le Commandant Georges Maîtrier, officier français et chef de la gendarmerie nationale qui se trouverait sur les lieux du crime à l'époque. Mais un quidam, un certain adjudant nommé Pauc aurait été l'auteur du coup de feu fatal à Sylva. En tout cas, c'était l'essentiel de la déposition de M. Kombaté Néné à la CVJR. Et cette information, le déposant affirme le détenir d'un parent proche de la victime. Hum !

Pauc n'est sans doute pas un personnage très connu. Le nom apparaît dans l'ouvrage Nous étions alors capitaines à l'armée d'Afrique de Pierre Daillier sans qu'on ne sache s'il s'agit vraiment de l'assassin de notre "héros national". Il va falloir faire des recherches minutieuses dans les archives du Service historique de la défense... dans deux ans, je crois, soit cinquante ans après quand ces archives seront déclassifiées. Avis aux historiens ! Et du côté des Etats-Unis à partir de 2036. A moins que Wikileaks n'abrège ce délai. De toute façon, tôt ou tard, tout se saura.

Dans l'immédiat, pour rétablir la mémoire de feu Sylvanus Olympio, deux choses que je propose toujours : des funérailles nationales le jour anniversaire de sa mort. Même si sa famille s'oppose au transfert de ses restes du Bénin au Togo, un monument pourra être érigé en son honneur dans la cour de la Présidence de la République... pour que son âme repose en paix.

vendredi 2 septembre 2011

Foutez-nous la paix et laissez-nous en paix

Pour avoir été moi-même journaliste au pays et pour avoir jusqu'à aujourd'hui copiner avec nombre d'ex-confrères, je sais que la corporation est minée par de nombreux maux dont le déficit de formation qui se paie cash par un manque de professionnalisme. Il y a aussi cette absence de convention collective de travail qui favorise une précarisation de l'emploi. Les maux sont nombreux mais même dans ce contexte les journalistes togolais s'acquittent vaille que vaille de leur devoir d'informer.

A l'ouverture du procès pour "atteinte à la sûreté de l'Etat" dont le cerveau présumé est le demi-frère du Président, l'accréditation des journalistes de la presse privée était subordonnée à la signature d'un document qui les engage à ne pas capter des images animés ou non et des sons dans la salle d'audience. Fait curieux, les journalistes des médias publics n'étaient pas soumis à cette astreinte.

De sources dignes de foi, les journalistes ont le premier jour du procès été l'objet de moult tracasseries. Fouille, confiscation de leurs matériels de travail et de leurs téléphones portables. L'un d'entre eux a même été interpellé et fouillé à nouveau, soupçonné de tweeter dans la salle d'audience. A quoi riment ces entraves au libre exercice du métier ? On nous explique que "l’article 8 du Code de l’organisation judiciaire (...) interdit de filmer les prévenus au moyen des caméras ou d’appareils photos dans les salles d’audiences." Pourquoi certains pourraient prendre des images et d'autres non ? En quoi le fait de tweeter les minutes du procès serait une violation du droit à l'image. Des questions pour lesquelles je ne demande pas de réponses.

Vers la fin de son règne, le dictateur Lansana Conté  malade avait tenu un meeting au Palais Sékhoutouréya. A l'endroit de ceux qui l’annonçaient pour mort, il a déclaré : "foutez-moi la paix et laissez-moi en paix". C'est la même chose que je veux dire ce matin à tous ceux qui posent des entraves au libre exercice du métier de journalisme au Togo.



Lire aussi : Retour sur les temps forts du procès Kpatcha de ce 1e septembre 2011, Noël Tadegnon.

mercredi 31 août 2011

Le pays que nous habitons s'appelle le Ghana

A l’occasion du Blog Day, comme le dirait l'autre, j’ai l’immense privilège de vous présenter des blogs sur le Ghana. Petite introduction : le Ghana est un pays anglophone d’Afrique de l’Ouest voisin du Togo francophone, mon bon pays. D’ailleurs, les deux pays sont mes patries. Et je les aime tous.

Les Togolais – les Loméens pour ne pas abuser – rêvent du Ghana. Avoir une ville aussi propre qu’Accra, Tema, Kumasi… avoir des leaders redevables (accountables), avoir un pays moins corrompu… Bref pour le Togolais moyen, je m’en suis rendu compte, le Ghana est une fascination.

Lomé, la capitale du Togo fait frontière avec ce pays mais au final peu de Togolais ont le courage de franchir juste par plaisir – juste par plaisir dis-je – cette barrière artificielle héritée de la colonisation et maintenue par les soi-disant chantres du panafricanisme et de l’unité africaine. Au-delà de la frontière géographique, il y a aussi une barrière linguistique qui ne facilite pas les échanges entre les citoyens des deux pays et une barrière monétaire (CFA - Ghana Cedi).

En revanche, les blogs ont ceci de merveilleux qu’ils permettent de transcender ces barrières en l’espace d’un billet, de faire découvrir l’autre, son cadre de vie, sa culture etc. Pour votre plaisir, voici cinq blogs sur le Ghana :

  1. Accra Daily Photo ou Accra Pictures By Day & Night : le vécu quotidien des habitants de la capitale ghanéenne en textes et images.
  2. Donaldiaba's Perspective : un blog personnel en anglais, bien tenu par Donald Makafui Diaba qui se définit comme un "self motivated young man from the Ewe land (Volta Region) of Ghana who is full of life".
  3. Aventures dans les chambres des femmes africaines (Adventures from the bedrooms of African women). Tout est dans la titre. Merveilleux blog et forum à la fois tenu par Nana Darkoa Sekyiamah et des contributeurs.
  4. Sophie au Ghana : blog francophone d'une expat. Le design n'est pas terrible mais j'aime ce style d'écriture ainsi que les belles vues prises au Ghana.
  5. Enfin, j'hésitais entre 3 autres blogs mais je retiens finalement Caro au Ghana. Caroline n'est plus au Ghana mais elle a démarré son blog dans ce pays. Pour lire les billets qui traitent du Ghana, il faut remonter le temps. Ses pérégrinations l'ont conduit un peu partout en Afrique d'où le nouveau nom du blog : Caroline en Afrique. L'auteure a cessé d'alimenter celui-ci depuis... mais elle nous laisse de bonnes pièces.
Illustration : Independance Arch, Stig Nygaard. Licence CC.

lundi 20 décembre 2010

Qu'on aime Ouattara ou qu'on ne l'aime pas...

Je me suis gardé jusqu'alors d'exprimer clairement mon point de vue sur la crise postélectorale en Cote d'Ivoire. Par prudence certes, parce que j'ai des amis ivoiriens dont j'ignore le positionnement. Mais aussi par dépit. Car comme le disent les magiciens : "On a tout fait, on a parlé, mais vraiment rien n'a changé".

Ces quelques lignes ne sont donc pas pour la Côte d'Ivoire mais pour mon pays, le Togo, et ses enfants les conducteurs.

Voici un homme dont on dit qu'il n'est pas Ivoirien, qui pourtant a été un jour Premier ministre de la République. A la mort de son mentor, il a fait des pieds et des mains pour lui succéder, contrairement aux dispositions constitutionnelles. Ses adversaires ont monté mille et une artifices pour l'empêcher d'être simplement candidat. Cependant, il finit par obtenir de haute lutte le droit d'être électeur et éligible et se présente à l'élection présidentielle de 2010, comme tout citoyen soucieux d'apporter sa pierre à l'édification de sa Nation.

Des qualités, il en a peut-être trop au point qu'on lui prête d'être l'instigateur du coup d'état de 1998 et le financier de la rébellion de 2002. Qu'on l'aime ou qu'on le déteste, Alassane Dramane Ouattara est un leader admirable. Il faut être stupide pour ne pas désirer un tel dirigeant pour son pays.

Pour 2015, je rêve d'un ADO pour le Togo. Un homme aux compétences indiscutables, au parcours politique exemplaire qui a su s'entourer d'une équipe gagnante et qui au final a l'estime de la communauté internationale (id si ita est).

On ne naît pas ADO, on le devient par la ténacité au travail et la persévérance dans la lutte. Amen !